Frecondazione in vitro. Agli Stati margine di discrezionalità nello stabilire il momento in cui nasce il diritto alla vita – Corte Europea dei Diritti dell’Uomo, IV Sezione, Sentenza 07/03/2006
DIRITTO ALLA VITA – EMBRIONE – TITOLARITA’ DEL
DIRITTO ALLA VITA – RINVIO ALLA LEGGE NAZIONALE
DIRITTO ALLA
VITA FAMILIARE – FECONDAZIONE IN VITRO – NORMATIVA NAZIONALE CHE CONSENTE AL
GENITORE BIOLOGICO DI REVOCARE NEL CORSO DEL TRATTAMENTO IL CONSENSO PRESTATO –
VIOLAZIONE ” ESCLUSIONE
La fecondazione artificiale all’attenzione della
Corte europea. Nel caso di specie, la ricorrente era ricorsa, con il consenso
dell’allora compagno, ad un trattamento di fecondazione in vitro prima di
sottoporsi ad un intervento di rimozione delle ovaie a causa di un cancro. Di
seguito il compagno, finita la loro relazione, aveva deciso di revocare il
consenso prestato, con la conseguente impossibilità di utilizzazione da parte
della ricorrente degli embrioni nel frattempo congelati. Le autorità
giudiziarie nazionali aveva respinto il ricorso della donna, volto tra l’altro
ad ottenere un’ingiunzione nei confronti dell’ex compagno affinchè prestasse il
consenso all’impiantazione degli embrioni.
La ricorrente si è quindi rivolta alla Corte europea lamentando che secondo la
normativa del Regno Unito il genitore biologico che ha dato il consenso ad un
trattamento di fecondazione artificiale puo’ successivamente revocarlo impedendo
l’utilizzo degli ovuli fecondati. Tale normativa aveva, a suo avviso, violato da
un lato il diritto alla vita degli embrioni e dall’altro il suo diritto alla
vita familiare, compromesso dalla distruzione degli embrioni, che
rappresentavano la sua possibilità di diventare madre.
La Corte ha respinto il ricorso, sostenendo che nei fatti non era ravvisabile
nè la violazione dell’art. 2 della Convenzione in quanto il Stati hanno un
margine di discrezionalità nello stabilire il momento in cui nasce il diritto
alla vita e la legge nazionale stabiliva che l’embrione non ha diritto o
interessi autonomi; nè la violazione dell’art. 8 della stessa in quanto la
legislazione nazionale nel prevedere la possibilità del genitore biologico di
revocare ad ogni stadio del trattamento il consenso prestato non aveva ecceduto
il margine di discrezionalità riconosciuta agli Stati nel disciplinare la
materia.
Corte Europea
dei Diritti dell’Uomo, IV Sezione, Sentenza 07/03/2006
AFFAIRE EVANS c. ROYAUME-UNI
(Requàªte n. 6339/05)
ARRàŠT STRASBOURG 7 mars 2006
EN FAIT
LES CIRCONSTANCES DE L’ESPE’CE
6. La requèrante est nèe en octobre 1971 et rèside à Wiltshire. Les faits,
tels qùils ont ètè ètablis par le juge Wall, qui a entendu les dèpositions
orales des parties (paragraphe 14 ci-dessous), sont les suivants.
A. Le traitement par FIV
7. Le 12 juillet 2000, la requèrante et son compagnon, J, entamèrent un
traitement dans une clinique de Bath spècialisèe dans la procrèation
mèdicalement assistèe (” la clinique “). La requèrante, qui avait ètè
marièe, avait ètè adressèe à cette clinique en 1995, avec son mari, pour un
traitement de la stèrilitè, mais, le couple s’ètant sèparè, le traitement
n’avait pas ètè poursuivi.
8. Le 10 octobre 2000, lors d’une consultation à la clinique, la requèrante et
J furent informès que des tests prèliminaires avaient rèvèlè que la jeune
femme prèsentait de graves tumeurs prècancèreuses aux deux ovaires et qùelle
devrait subir une ovariectomie bilatèrale. On leur indiqua que, les tumeurs se
dèveloppant lentement, il serait possible de prèlever quelques ovules avant
l’ablation, en vue d’une fècondation in vitro (” FIV “), mais que ce
prèlèvement devrait intervenir à bref dèlai.
9. La
consultation du 10 octobre 2000 dura environ une heure au total. Une infirmière
expliqua que la requèrante et J devraient signer chacun un formulaire pour
exprimer leur consentement au traitement par FIV, et que, conformèment aux
dispositions de la loi de 1990 sur la fècondation et l’embryologie humaines (Human
Fertilisation and Embryology Act 1990, ” la loi de 1990 “), chacun d’eux aurait
la possibilitè de retirer son consentement à tout moment tant que les embryons
n’auraient pas ètè implantès dans l’utèrus de la requèrante (paragraphes
27-30 ci-dessous). Celle-ci demanda à l’infirmière s’il serait possible de
congeler ses ovules non fècondès, mais s’entendit rèpondre que la clinique ne
pratiquait pas cette technique, qui se caractèrisait par un taux de rèussite
bien moins èlevè. A ce moment-là, J tenta de rassurer la requèrante en lui
disant qùils n’allaient pas se sèparer, qùelle n’avait pas besoin d’envisager
la congèlation de ses ovules, qùelle ne devait pas àªtre aussi pessimiste et
qùil voulait àªtre le père de l’enfant qùelle mettrait au monde. Le juge Wall
estima que J avait donnè ces assurances de bonne foi, car, à l’èpoque, il
aimait la requèrante, voulait vraiment avoir un enfant avec elle et ètait dèterminè
à l’aider à traverser cette pèriode très difficile (voir aussi le paragraphe
15 ci-dessous).
10. Par la suite, le couple donna les consentements nècessaires en signant les
formulaires prèvus par la loi de 1990 (paragraphe 29 ci-dessous).
Directement sous le titre du formulaire figurait la consigne suivante :
” N.B. ” Ne signez le prèsent formulaire que si vous avez reà§u des informations
sur le sujet et si l’on vous a proposè des conseils. Vous pouvez modifier les
conditions du consentement à tout moment, sauf s’il concerne du sperme ou des
embryons ayant dèjà ètè utilisès. Veuillez, selon les cas, inscrire un
nombre ou cocher une case. ”
Par les cases qùil cocha, J exprima son consentement à ce que son sperme fà»t
utilisè pour fèconder les ovules de la requèrante in vitro, et à ce que les
embryons ainsi crèès fussent utilisès aux fins du traitement conjoint de la
requèrante et de lui-màªme. Dans la rubrique ” conservation “, il choisit que
les embryons obtenus in vitro à partir de son sperme fussent conservès durant
la pèriode maximale de dix ans, et que la conservation du sperme et des
embryons se poursuivà®t s’il venait à dècèder ou à perdre ses facultès
mentales avant l’expiration de ce dèlai. La requèrante signa un formulaire qui
ètait pratiquement identique à celui de J, à l’exception près qùil
concernait, non pas le sperme, mais les ovules.
Comme J, par les cases qùelle cocha, elle consentit à son propre traitement et
à son traitement ” avec un partenaire nommèment dèsignè “.
11. Le 12 novembre 2001, le couple se rendit à la clinique et onze ovules
furent prèlevès et fècondès. Six embryons furent ainsi crèès et mis en
conservation.
Le 26 novembre, la requèrante subit l’ablation de ses deux ovaires.
On l’informa qùil faudrait attendre deux ans avant de pouvoir tenter
d’implanter un embryon dans son utèrus.
B. Le
retrait du consentement de J et la procèdure devant la High Court
12. En mai 2002, la relation entre J et la requèrante prit fin. Ils discutèrent
du devenir des embryons. Le 4 juillet 2002, J notifia par ècrit à la clinique
que le couple s’ètait sèparè et que les embryons devaient àªtre dètruits.
13. La clinique informa la requèrante que J avait retirè son consentement à
l’utilisation ultèrieure des embryons et dèclara se trouver par consèquent
dans l’obligation lègale de les dètruire, en application de l’article 8 § 2 de
l’annexe 3 à la loi de 1990 (paragraphe 29 ci-dessous). La requèrante entama
une procèdure devant la High Court. Elle sollicitait de celle-ci une ordonnance
enjoignant à J de rètablir son consentement à l’utilisation et à la
conservation des embryons, et une dèclaration prècisant, entre autres, que J
n’avait pas modifiè son consentement du 10 octobre 2001 et ne pouvait pas le
faire. Elle demandait aussi à la High Court de dèclarer, en vertu de la loi de
1998 sur les droits de l’homme (Human Rights Act 1998), que l’article 12 et l’annexe
3 de la loi de 1990 ètaient incompatibles avec la Convention et portaient
atteinte aux droits garantis par les articles 8, 12 et 14 de celle-ci en ce qui
la concernait. En outre, elle allèguait que les embryons avaient droit à la
protection prèvue aux articles 2 et 8 de la Convention. La High Court rendit
des ordonnances provisoires imposant à la clinique de conserver les embryons
jusqùà la fin de la procèdure.
14. Le juge du fond, le juge Wall, tint une audience qui dura cinq jours, au
cours desquels il entendit notamment la requèrante et J. Le 1er octobre 2003,
il rejeta les demandes de la requèrante par un jugement de 65 pages (Evans v.
Amicus Healthcare Ltd and others, [2003] EWHC 2161 (Fam)).
15. Le juge conclut que J n’avait pas donnè son consentement à ce que la
requèrante poursuivà®t le traitement seule ni à ce que les embryons fussent
utilisès quoi qùil arrivà¢t. Il rejeta la thèse de la requèrante selon
laquelle J ètait forclos à retirer son consentement. Il considèra en effet
que la requèrante et J avaient tous deux entrepris le traitement de bonne foi,
convaincus que leur relation serait durable.
Or, ils s’ètaient sèparès et, compte tenu de ce changement de situation, il
serait inèquitable de ne pas autoriser chacune des parties à changer d’avis et
à retirer son consentement au traitement.
16. En ce qui concerne les griefs que la requèrante tirait de la Convention, le
juge Wall estima en substance qùun embryon n’ètait pas une personne jouissant
de droits protègès par la Convention, et que le droit de la requèrante au
respect de sa vie familiale n’ètait pas en jeu. Il reconnut toutefois que les
dispositions litigieuses de la loi de 1990 entraà®naient une ingèrence dans
l’exercice, par les deux parties, de leur droit au respect de leur vie privèe,
mais considèra que cette ingèrence ètait proportionnèe au but poursuivi,
puisque la lègislation instaurait une procèdure de traitement reposant sur
deux piliers, le consentement et l’intèràªt de l’enfant à naà®tre (paragraphes
26-27 ci-dessous). Il jugea parfaitement justifiè que la loi exigeà¢t que les
deux personnes formant le couple qui entreprenait un traitement par FIV fussent
d’accord sur ce traitement, et qùelle permà®t à chacun d’eux de cesser d’y
participer à tout moment, jusqùau transfert embryonnaire.
17. Le juge Wall souligna que les dispositions de l’annexe 3 de la loi
(paragraphe 29 ci-dessous) s’appliquaient de le màªme faà§on à tous les patients
suivant un traitement par FIV, indèpendamment de leur sexe, et conclut en
prenant un exemple pour montrer que l’exigence du consentement conjoint pouvait
avoir des consèquences analogues pour un homme stèrile :
” Imaginons qùun homme soit atteint d’un cancer des testicules et que son
sperme, recueilli avant l’intervention chirurgicale entraà®nant une stèrilitè
dèfinitive, soit utilisè pour crèer des embryons avec les ovules de sa
compagne. En cas de sèparation du couple avant le transfert embryonnaire, il ne
viendrait à l’idèe de personne de prètendre que cette femme ne peut pas
retirer son consentement au traitement et refuser que les embryons soient
implantès dans son utèrus. Or, les dispositions de la loi, tout comme les
droits inscrits dans la Convention, s’appliquent aux hommes et aux femmes sans
distinction. ”
C. L’arràªt
de la Cour d’appel
18. La requèrante saisit la Cour d’appel, qui la dèbouta par un arràªt rendu le
25 juin 2004 (Evans v. Amicus Healthcare Ltd, [2004] EWCA Civ 727).
La Cour d’appel considèra que l’objectif de la loi de 1990 ètait clairement de
n’autoriser l’implantation de l’embryon que si les deux parties avaient maintenu
leur consentement tout au long du processus ; elle se dèclara extràªmement
rèticente à reconnaà®tre ou à ètablir un principe de dèrogation qui serait
contraire à la procèdure instaurèe par le Parlement.
J ètait donc en droit de retirer son consentement comme et au moment où il
l’avait fait, et ce retrait empàªchait à la fois l’utilisation des embryons et
la poursuite de leur conservation. La Cour d’appel rejeta l’argument de la
requèrante selon lequel J aurait dissimulè son ambivalence, ce qui aurait
conduit la jeune femme à opter pour le traitement conjoint des deux membres du
couple. La juridiction estima en effet que cet argument mettait en cause de
manière injustifièe la conclusion du juge du fond, qui se trouvait
indèniablement dans une position privilègièe pour statuer puisqùil avait pu
apprècier les dèpositions orales de la requèrante, de J et des autres
tèmoins (paragraphes 14-15 ci-dessus). Par ailleurs, le conseil de J avait
informè la Cour d’appel que, de toute èvidence, si son client avait retirè
son consentement, ce n’ètait pas pour des raisons purement financières, mais
pour des raisons de principe.
19. Les Lords Justices Thorpe et Sedley estimèrent que, s’il y avait bien
ingèrence dans la vie privèe des parties, cette ingèrence ètait cependant
justifièe et proportionnèe, pour les motifs suivants :
” [La requèrante] demande un moyen moins drastique qui prendrait la forme d’une
règle de droit privant le retrait